mardi 31 mai 2011

L’escale guyanaise de Gisèle Pineau

 Encore toute impressionnée par ce choix des élèves de lui avoir attribué le Prix Carbet des lycéens, Gisèle Pineau a apprécié ses rencontres avec les jeunes guyanais, eux-mêmes très intéressés par une discussion avec l’écrivain qu’ils avaient vivement soutenu en ce mois de février 2011. « Tous derrière Gisèle Pineau », ce mot d’ordre circulait, tandis que « moi à Marie-Galante, j’étais loin de m’imaginer qu’ils étaient en train de se battre pour mon livre ».
Lors de son récent passage au lycée Damas à Rémire et au lycée Bertène Juminer à Saint Laurent du Maroni, l’auteure guadeloupéenne a pris le temps d’expliquer les raisons de ce livre témoignage, Folie, aller simple, une évocation de souvenirs tirés de son milieu professionnel d’infirmière psychiatrique, mais aussi un livre plein d’humanité dans lequel se retrouvent ses thèmes de prédilection, la discrimination, le rejet de l’autre, la violence et le racisme. « Ces rencontres ont été passionnantes. Pour moi c’est un vrai bonheur de voir ces jeunes intéressés par ce livre qui n’était pas destiné à la jeunesse. Il rend compte d’une réalité, la maladie mentale, les souffrances, le mal-être …ils ont pénétré un monde inconnu qui les a touché dans une période d’adolescence où ils se questionnent sur eux-mêmes et leur devenir».

A chaque édition de ce Prix l’auteur lauréat se montre toujours très sensible à cette récompense attribuée par des élèves. « Un choix vrai et sans intérêt » estime Gisèle Pineau qui ne cache sa satisfaction de l’attention que suscitent ses livres –trois fois sélectionnés (Fleur de Barbarie, Mes quatre femmes, Folie, aller simple) au cours de ces dernières années- auprès de ce public scolaire.
Cette sensibilité à fleur de peau que dégage l’auteur les lycéens l’ont perçue. Le désir d’écrire commence très tôt chez Gisèle Pineau, dès 7 ans, annonce-t-elle. Une acte d’écriture  « pour me consoler de la vie, d’un environnement hostile, de la violence et du racisme ».

 L’écriture comme refuge, comme évasion, comme un moyen très puissant de se libérer et d’aller à la rencontre de l’autre. Pour l’auteur « écrire des histoires est un moyen d’entrer en relation avec les autres ». Dans Folie, aller simple, ceux qui souffrent de troubles mentaux, des êtres humains dont émanent tant de souffrances, qui sont si fragiles et qui ont droit à un sourire, à un geste…
Durant ces rencontres les questions des lycéens continuent de fuser, Gisèle Pineau répond à chacune d’entre elles avec calme, douceur et précision. «J’aime mêler les petites histoires de famille avec la Grande histoire, indique l’auteur qui travaille  en profondeur la psychologie de ses personnages qu’ils soient solitaires, malades ou  hallucinés.

De nombreux échanges et quelques remarques d’élèves « dans ce livre on a l’impression d’être à côté de vous ... », « j’ai pu voir ce monde à travers vos yeux », « je suis entré tout de suite dans le livre… ».

Aujourd’hui Gisèle Pineau a choisi de vivre en Guadeloupe. Installée à la campagne à Marie-Galante, un havre de paix où elle écrit en toute sérénité. D’ailleurs elle y prépare son prochain roman qui se passera en Guadeloupe…  T.L.
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samedi 21 mai 2011

Gisèle Pineau en Guyane

Gisèle Pineau lauréate du 11è Prix Carbet des lycéens
à la rencontre des élèves de Guyane du 23 au 26 mai 2011

L’écrivaine guadeloupéenne Gisèle Pineau s’entretiendra avec les lycéens de Guyane lundi 23 mai au lycée Damas de Rémire et mardi 24 mai au lycée Bertène Juminer.

Le Prix Carbet des lycéens a été décerné à Gisèle Pineau par les élèves de Guadeloupe, Guyane et Martinique le 9 février 2011 pour son roman Folie, aller simple. Journée ordinaire d’une infirmière. Ed. Philippe Rey. 2010.

Extrait
« Pourquoi je fais ce métier tellement ingrat ?
Trente ans que je suis là… à l’hôpital psychiatrique…
Là où la mort rôde à toute heure.
Là où la folie est un aller simple.                                       
Là où la douleur s’expose sans fard.                                 
Là où on rit sans raison ni jugement.                                    
Là où les cris sont un langage ordinaire.
Là où l’angoisse étreint et poisse. »
Infirmière dans un service de psychiatrie depuis l’âge de vingt ans, Gisèle Pineau raconte, avec sobriété et intensité, ce métier « extraordinaire… puisqu’on se tient à l’extérieur, en bordure de la norme, du normal, de la normalité ». Elle revient sur son propre itinéraire : son arrivée en métropole, la faculté de Lettres et les petits boulots, les après-midis avec la vieille Lila aux souvenirs contrastés. Et surtout, elle fait partager son quotidien à l’hôpital, cet apprentissage permanent, et difficile, auprès des malades – ces « fous » que la société ne veut pas voir, isole, et aide de moins en moins.
Gisèle Pineau décrit l’ordinaire, les rituels, les délires des uns et des autres, les trop nombreux suicides qu’on ne sait pas empêcher, les dépressions profondes, la paranoïa sans limite, le manque de places dans les services, les crispations autour du 4 heures, les insultes parfois suivies de coups… Mais aussi – cela arrive –, les moments de répits lumineux, quand le dialogue et le rire parviennent à s’immiscer.
Et toujours en arrière-plan, l’écriture, son formidable « délire à elle », l’infirmière-écrivain, vie parallèle inépuisable qui lui permet de trouver son équilibre.
Ce livre profondément humain est un parcours d’humilité car, comme le répète un vieil infirmier à Gisèle Pineau : « Quand on soigne les fous, c’est nous-mêmes qu’on soigne, qu’on aide, qu’on réconforte. Tous ces grands malades sont des reflets de nous-mêmes dans le miroir. »